Les élections législatives viennent de marquer un tournant important du retour à la normalité et à l’ordre constitutionnel au Mali (en attendant la fin du processus par les communales au 1er trimestre 2014).
Le pays vient d’être doté d’un nouveau parlement, effectivement un nouveau car seul 28 des anciens députés sont reconduits dans leurs circonscriptions. Les Maliens ont-ils décidé réellement pour le changement ? Cette Assemblée Nationale saura jouer son rôle constitutionnel tant attendu ? Beaucoup d’analystes politiques et constitutionnalistes considèrent que les législatures de 1992 à 2013 ont une responsabilité de taille dans les causes de la crise connue. Ces élus ont fait prévaloir un consensus donnant quitus à l’exécutif de conduire le pays dans la situation qui n’est plus à décrire. Du coup cette image terne et de bouffons des députés a occasionné une perte notable de la confiance du citoyen lambda à la chose politique.
Voyons la configuration de la nouvelle assemblée un peu en détail. Le RPM, parti présidentiel en sort première force politique avec 66 députés sur 147, suivi par l’URD avec 17 et de l’ADEMA-PASJ avec 16. Les micro-partis se positionnent avec des scores de 6 à 1 députés. L’ADEMA, ex-parti présidentiel et ex-première force politique (députés et mandats locaux) de 1992 à 2013 connait sa plus grande et spectaculaire chute. 76 députés sur les 117 en 1992, 128 sur 147 en 1997, elle a entamé aujourd’hui une irréversible chute due aux fortes divisions internes avec des conflits d’intérêts trop antagonistes. Le candidat du parti à la présidentielle (Dramane Dembélé), renforcé par un autre candidat à la présidentielle (Mountaga Tall) vient de subir à Ségou le plus célèbre échec de l’histoire de toutes les législatives au Mali. Il est rejoint sur ce tableau d’échec par certaines têtes d’affiches du parti, tels Assarid Ag Imbarkawane (après 20 ans de vie parlementaire à Gao), Nock Ag Attia (30 ans en fonction), Adama Sangaré (Maire du District de Bamako), Oumarou Ag Ibrahim (Président du Haut Conseil des Collectivités Territoriales), etc. L’Adema est en quête d’un véritable leader consensuel à l’absence d’un « leader naturel ».
Certains grands et redoutés pontes et de l’hémicycle issus de partis opportunistes ou appuyés par ATT connaissent des échecs (dès le 1er tour) aussi lamentables que les barons défaits de l’Adema. Il s’agit de Konimba Sidibé candidat malheureux à la présidentielle, du célèbre avocat et transhumant politique Kassim Tapo, Baba Sandi Haïdara, Me Demba Traoré, Saoudatou Dembélé, Hamidou Diabaté, etc. Le turbulent Oumar Mariko a été élu péniblement à Kolondiéba, il échappe du coup à cette vague d’humiliation.
La question est de savoir maintenant, qui acceptera de s’afficher réellement en leader(s) de l’opposition dans un pays ou l’opposant est considéré comme un « clochard », signe d’immaturité aussi des majorités présidentielles. Quelles seront les chances de se faire entendre par la majorité présidentielle de ce ou ces opposants ? Que reste t-il du bloc FDR après ces législatives ? Les réalités de constitution de ce bloc prévalent-elles toujours ? Est-ce cette assemblée pourra se donner l’image attendue par les Maliens et jouer pleinement son rôle dans sa mission de s’opposer ou de soutenir les programmes du Président IBK ?
Rien qu’avec la saisine du Gouvernement d’inculpation de l’ex-Président ATT pour haute trahison, cette assemblée ne devra pas chômer. L’éclat, l’efficacité de l’institution viendra plus du contrôle des activités gouvernementales par quelques têtes fortes que des fausses querelles entre groupes parlementaires.
L'un des véritables défis de cette législature est sa capacité à accompagner de manière responsable le ou les gouvernements de IBK dans sa gestion de la crise du Nord. Il s'agit de le (ou les) cadrer contre toutes dérives impopulaires car les premières actions du Gouvernement de Oumar Tatam LY (libérations des detenus MNLA, insécurité à Kidal, faible intervention de l'Etat lors de la prise en charge sinistrés des innondation) ont créé une certaine indignation qui laissent croire à d'éventuels dérapages. Le Mali de 2014 attend la matérialisation de la lutte contre la corruption et contre l'impunité.
Il faudra aussi s’attendre à moins de passions dans ces tiraillements entre les dits groupes car le jeu est joué d’avance, il n’y aura pas une force redoutable et crédible qui s’opposera à la majorité présidentielle du moment ou bon nombre des micro-partis s’affilieront très vite dans l’objectif de bénéficier des faveurs du Président IBK à qui les Maliens demandent prudence face aux opportunistes et aux courtisans.
CONFIGURATION DE LA NOUVELLE ASSEMBLÉE
APRÈS RÉSULTATS DÉFINITIFS
Rang
|
Partis
|
Nombre députés
|
1er
|
RPM
|
66
|
2e
|
URD
|
17
|
3e
|
ADEMA
|
16
|
4e
|
FARE
|
6
|
5e ex.
|
CODEM
|
5
|
5e ex.
|
SADI
|
5
|
7e
|
CNID
|
4
|
8e ex.
|
PARENA
|
3
|
8e ex.
|
PDES
|
3
|
8e ex.
|
MPR
|
3
|
8e ex
|
ASMA
|
3
|
12e ex.
|
ADP
|
2
|
12e ex
|
CDS
|
2
|
12e ex.
|
MIRIA
|
2
|
12e ex.
|
UM RDA
|
2
|
16e ex.
|
YELEMA
|
1
|
16e ex.
|
UDD
|
1
|
16e ex.
|
PRVM
|
1
|
16e ex.
|
APR
|
1
|
Non positionnés
|
Indépendants
|
4
|
Source : Essor